J18 & J19 - Deux jours chez Trévor

Après une bonne nuit dans le grand lit de la chambre du rez-de-chaussée, nous nous levons ves 8h25, afin d'être prêts rapidement, et de ne pas faire perdre de temps à Trévor, qui a pris sa journée pour nous, et est levé depuis un bon bout de temps. Il nous prépare des oeufs au plat comme petit déjeuner, nous n'avons qu'à nous asseoir. Décidement, nous sommes vraiment bien reçus. 9h30, départ en voiture, à bord d'une de ses deux Honden (une marque locale filiale de General Motors), pour aller visiter les vignobles de la région viticole la plus célèbre d'Australie, la Barossa Valley. Nous parcourons les nationales pendant une petite heure, puis arrivons à Barossa Dam, un barrage dont nous n'avons pas entendu parler, mais qu'il souhaite nous montrer. C'est le plus haut d'Australie, et aussi l'un des plus vieux, car construit entre 1899 et 1903. Il est 10h45 quand nous marchons sur l'allée séparant un grand lac, sur notre gauche, du vide et de la vallée, sur notre droite. Fred se place à l'autre bout de l'édifice, et Audrey, de l'autre côté, peut lui parler presque comme s'il était à côté d'elle, par l'effet de la courbure de la structure, qui conduit le son de manière étonnante. Nous avions déjà expérimenté cela à New York, grâce aux plafonds courbés de Grand Central Station, mais jamais séparés par une telle distance. Nous ne restons pas longtemps, juste ce qu'il faut pour observer le barrage, se parler de l'autre bout, et revenir vers la voiture. Un car de touristes visitant les vignobles est là aussi. Nous reprenons ensuite la route, sous un ciel assez nuageux. En chemin, nous discutons de la vie en France, de notre quotidien, ou de son travail. En fait, c'est le boss de l'imprimerie. Son téléphone, branché directement sur les enceintes de la voiture, sonne régulièrement. Le décor est vraiment différent de celui de la semaine dernière : des champs aux couleurs jaunes, des élevages de moutons, des chevaux, un relief vallonné, puis s'ajoutent des vignes plutôt hautes, ou des fermes (grandes) et exploitations agricoles. Trévor cherche parfois son chemin, car il n'est pas venu depuis un bout de temps. Ambiance de campagne française, avec des routes plutôt désertes. Notre premier stop se fait à la propriété Lou Miranda, où nous sommes accueillis par un homme d'une quarantaine d'années très jovial. Trévor présente Fred comme un "French wine connoisseur", et explique notre venue en Australie. Nous goûtons une demi-douzaine de vins, du blanc pétillant au sec, puis quelques rouges à base de Cabernet Sauvignon ou de Merlot. Il nous fait également découvrir quelque chose que nous n'avions jamais vu, un rouge pétillant. Oui. Ca mousse en bouche, et à vrai dire, une fois la surprise passée, ce n'est pas mauvais. Cela n'accompagnerait sûrement pas une viande ou un plat, mais en apéritif, cela peut avoir du sens. Audrey aime bien, c'est assez sucré. Le contact avec le vigneron est très agréable. Trévor, qui conduit, ne boit pas. Nous reprenons la voiture et allons ensuite à Jacob's Creek, probablement le vignoble le plus célèbre du pays, et le plus exporté. La propriété est beaucoup moins rustique, plus moderne, avec une gallerie racontant l'histoire de la marque pour accueillir les visiteurs. Les vignes sont toutes très ordonnées, un peu comme si nous étions dans un musée, et qu'il fallait les mettre bien en valeur. Nous testons quelques fonds de verre, mais un peu moins, car l'atmosphère est moins chaleureuse, et le contact souriant mais un peu plus froid. On sent la machine commerciale et la puissance de la marque. Les vins sont moyens. Au delà de tous ces goûts et ressentis, Fred est surtout interessé par les méthodes de production, mais il est difficile d'en savoir beaucoup. Vers 13h, nous rejoignons Chateau Dorrien, où la patronne nous explique que cette appellation est uniquement cosmétique, et pour le marketing, car personne n'a le nom de "chateau" ici. Une manière de se démarquer, et de faire classe, français. D'ailleurs, ce nom n'est pas du tout contrôlé. La demeure est plus petite, mais il y a quelque chose d'original : il y a un petit musée, avec d'anciennes cuves peintes - représentant des scènes de vie du vignoble (les vendanges, le pressage, la dégustation...) - d'autres ouvertes façon petite pièce d'exposition (avec des objets de la vie courante des années 30), d'anciens outils exposés, des fûts, des pressoirs, ou encore des étiquettes de bouteilles produites ici... une idée qui pourrait en donner à d'autres, ou plairait certainement en France... Le vin est bon, et la première bouteille étonnante, avec une odeur et un goût un peu chocolaté. Une vraie surprise, sans vraiment savoir si nous aimons ou pas. La patronne se targue d'ailleurs de cette spécificité et de cette originalité. Fred discute avec elle, et comme un peu partout, des copeaux sont rajoutés au vin dans des barriques neuves. En sortant, le vent est fort, et balaie les palmiers plantés juste à côté des vignes. Un mélange qui nous frappe, car nous n'avions jamais associé ces deux éléments sur une même image. Nous allons ensuite au vignoble Kaesler, où de nombreuses bouteilles (vides) de grands crus français sont exposées. Fred goûte deux ou trois vins, mais est frustré de ne pas en apprendre plus sur les techniques utilisées, ou sur l'influence de la composition du sol sur le vin. Partout, on raisonne ici en terme de cépage, et non de terroir. La primauté est donnée aux grains, pas au reste. 14h, nous reprenons la voiture, et montons sur les hauteurs, à "sculpture park" pour avoir un joli point de vue sur toute la Barossa. Enfin, nous faisons un dernier arrêt, au domaine "Saltram", où l'accueil est distant, moins sympa, détaché. Nous ne goûtons que deux blancs, secs, très différents au palais (l'un couvrant plutôt les côtés de la bouche, au niveau des joues, l'autre plutôt le palais lui-même, en hauteur), mais n'avons pas envie de rester. Trévor s'abstient toujours de goûter.


La deuxième partie de la journée, à partir de 14h50, après un arrêt pour acheter quelque chose à grignoter, se passe de l'autre côté de la Murray River, que nous franchissons en mettant la voiture sur un bac, aux côtés de quelques autres, qui traverse la rivière et nous emmène sur l'autre rive en moins de 10 minutes. La Murray River, longue de 650km, est le principal fleuve se jetant dans l'océan, avec d'autres plus petits, près de Victor Harbor, où nous sommes presque, et irrigue les vignobles de la région. Un animal du coin, le "wombat", se trouve facilement dans les environs. Nous arrivons à Murray Bridge, et passons regarder ce pont construit en 1879, célèbre dans le coin pour être le premier à avoir traversé la rivère Murray. Nous arrivons à 16h dans la ville d'à côté, l'une des plus célèbres du Sud.... pour son taux de chômage et le nombre de crimes commis (au sens anglo-saxon, cad de délits). Ici, le toit des maisons n'est pas en tuiles, mais en tôle, et est toujours plat. Trévor nous montre une attraction qui nous fait bien rire mais présente peu d'intêret, le "bunyip", réplique animée d'un monstre censé habiter le fleuve. A côté, soudain, des dizaines de perruches blanches et roses s'envolent toutes ensemble, et passent tout près de nous. Trévor nous emmène ensuite visiter l'usine d'impression qu'il dirige. 72 journaux y sont imprimés, dont certains en chinois ou en indien. Nous passons 40 minutes à lui poser des questions sur le fonctionnement de telle ou telle chose, ou quel est le process depuis la réception du journal en pdf jusqu'à l'impression, en passant par le reste, les couleurs, les problèmes les plus classiques, ou l'organisation générale. Les machines tournent en continu dans un vacarme terrible. Les bureaux se trouvent à côté, et son bureau dispose d'une fenêtre sur chaque partie. Nous repartons pour la maison, et arrivons vers 17h30. Aujourd'hui, nous sommes passés par des paysages de Bourgogne dans un climat méditerranéen. Nous aurions aussi pu aller visiter la Mc Laren Valley, ou la Clare Valley, elles aussi reconnues.


Le soir, nous recontrons une amie, Tricia, et partons tous dîner à Hahndorf, une ville allemande, de 1700 habitants, fondée en 1839 par une famille luthérienne persécutée en Prusse. Le décor du restaurant où nous allons est typique aux couleurs de la Bavière, blanc et bleu, et nous pouvons si nous souhaitons prendre de la choucroute, ou différents types de saucisses ou de bières. Nous rentrons vers 22h30, chantons comme hier (Trévor veut que son amie Tricia entende la voix d'Audrey), puis allons au lit vers 23h15.


Le lendemain, vendredi, nous commençons la journée par utiliser la machine à laver, sur proposition de notre hôte. Quand nous partons, il fait 14°, le ciel est couvert, nous avons froid, et il pleut légèrement. C'est parti pour 1h de route, jusqu'à Victor Harbor, une ville côtière, style station balnéaire vide en hiver et pleine en été, assez aisée, de 10 400 habitants. Nous nous arrêtons à Goolwa, la ville où la Murray River se jette dans l'océan, et commençons à marcher le long d'un petit barrage, quand un orage approche et nous oblige à  rebrousser chemin. Il pleut d'ailleurs à grosses gouttes à peine rentrés dans la voiture. Nous allons donc voir l'océan par la route, plutôt qu'à pieds. La mer est agitée, magnifique, et les vagues désordonnées viennent s'écraser contre la roche claire des parois verticales. Puissance de l'élément marin. Nos ventres commencent alors à crier famine. Il faut dire que nous n'avons pas voulu déranger Trévor ce matin, et n'avons pas voulu qu'il prépare quelque chose, en pensant que nous nous arrêterions peu de temps après être partis. C'était il y a deux heures. Nous continuons à découvrir les environs, jolis, mais un peu triste avec ce plafond nuageux très breton. Les vagues sont belles, mais irrégulières. Nous sentons l'influence du surf quand nous apercevons un banc en pierre en forme de planche. Lors d'un nouvel arrêt en voiture, à droite, au fond, nous apercevons notre premier surfeur. Ici, normalement, l'eau est turquoise. Mais aujourd'hui, avec la pluie, elle n'est que grise foncée.


A Port Elliot, vers 12h, nous nous arrêtons à un point de vue où, entre mai et octobre, on peut normalement apercevoir des baleines. Ce ne sera pas pour nous, dommage. Les vagues explosent contre les rochers. Top. L'écume, et la mousse provoquée lorsqu'elles tapent contre eux, comme sur celui au loin en forme de pudding, est saisissant. Enfin, nous allons déjeuner, à Victor Harbor dont nous sommes tout proche. Une ville où beaucoup de retraités viennent habiter. Des maisons sont construites face à la mer, mais elles sont loin d'avoir le charme des bâtisses bretonnes que l'on peut apercevoir à Dinard ou St Malo par exemple. Il y a encore pas mal d'espace pour en construire d'autres, malgré le prix de l'immobilier. Avantage d'avoir de l'espace. Le long des maisons longeant le canal, des plages sont aménagées, avec des aires de jeu pour les enfants, ou des barbecues électriques à disposition (quelque chose que nous n'avons pas vu en France, et voyons partout ici, en Australie). Juste avant, nous nous arrêtons à Kleinings Lookout, à l'entrée de la ville, et d'où l'on voit le "bluff" (la petite colline) au loin surplombant la baie, offrant un beau point de vue. C'est là que nous allons manger. Au bord de l'océan, nous retrouvons les mêmes abres que nous avions vus en Chine, à Yangshuo. Souvenirs qui reviennent en tête, de manière impromptue. Face au restaurant, nous voyons nos premiers pélicans. Nous déjeunons autour d'un agréable thon frais, à peine cuit, comme il se doit, et repartons vers 13h45 pour faire un tour sur le "bluff". Aujourd'hui, clairement, nous découvrons la côte. Un peu plus loin, nous prenons le pont piéton pour aller à pieds, plutôt que de prendre le tram tiré par un cheval de traie disponible, sur Granite Island, juste en face, afin de voir les colonies de Little Pinguins. Comme à Coober Pedy pour les kangourous, nous visitons un centre accueillant des pingouins blessés, environ une dizaine. Un panneau demandait d'ailleurs il y a cinq minutes de leur laisser la priorité, car l'île en abrite encore des sauvages. En Australie, la faune et la flore sont partout, et laissées dans leur état sauvage. La faible densité du pays le permet, mais la culture de préservation des locaux rend tout cela perenne. Nous arrivons pile à l'heure où ils vont être nourris. Ils sont drôles, petits, avalent de petits poissons crus, et nagent de la même manière que les oiseaux volent, gracieusement. D'ailleurs, les mouettes sont à l'affut d'un poisson égaré, ou mal attrapé par un pingouin. A l'intérieur de la petite maison à côté, nous voyons dans un aquarium un baby bearded-dragon de 19 mois, que Fred peut prendre dans sa main avec l'accord du manager. Docile, l'animal se laisse caresser. En passant le bout du doigt, la peau est lisse lorsque le mouvement va de la tête à la queue. En revanche, le doigt accroche sur des dizaines de picots en faisant le mouvement inverse. La personne en face de nous nous explique que cela est un mécanisme de défense, afin de se protéger contre les attaques arrières. Très sympa que de pouvoir observer et toucher un tel animal. Vers 15h20, nous repartons, reprenons le pont, où des dauphins peuvent parfois être aperçus. Le soleil se montre un peu, et permet d'apecevoir quelques nuances de bleus sur l'eau. Sur la route du retour, en plus des champs ou des vignes, nous passons à côté de plusieurs champs d'oliviers.


En fin d'après-midi, nous nous arrêtons faire des courses, car Fred veut faire plaisir à Trévor, et cuisiner ce soir. Il a prévu d'inviter un ou deux amis, notamment pour voir le match de "Aussie Rules", le sport national ressemblant à première vue à du rugby, mais avec moins de règles, ainsi que la course de chevaux où Black Caviar court, une bête n'ayant pas perdu depuis 27 courses et célèbre dans tout le pays, en direct ce soir. Fred prépare pendant la fin d'après-midi un carpaccio de langoustines (cette fois-ci des grosses crevettes, car ils ne connaissent pas les langoustines) façon Passart, une entrée qu'il adore, un peu longue à préparer (pas mal de travail sur la chair de la crevette/langoustine), fraîche, et subtile. Il prépare aussi, avec les carcasses, un oignon, une carrotte, un poireau et de la crème fraîche, une bisque. Tricia, l'amie de Trévor que nous avons rencontrée hier, est de la partie, comme Renée, une australienne de presque 30 ans travaillant pour le journal de Port Lincoln. Nous regardons le match et la course d'un oeil, à discuter tous ensemble, et à commander ensuite des pizzas. Nous regardons aussi des vidéos de concert, certaines des spectacles d'Audrey, puis certaines de notre site (le coup du dialogue de sourd avec le Japonais, la blague sur la place Tien'Anmen, ou encore la bar à chat à Tokyo...), que Trévor adore. Vers 1h du matin, nous éteignons la lumière. Demain, nous prenons notre nouvelle voiture, pour continuer notre chemin vers Melbourne, où nous souhaiterions être dans 4 ou 5 jours.

 

 

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Commentaires: 2
  • #1

    François P. (mercredi, 03 avril 2013 08:22)

    Et qu'à fait black caviar ?

  • #2

    Sophie (jeudi, 13 août 2020 00:10)

    Mmmmm le caviar de langoustines.... vos hôtes ont été gâtés !
    Que de belles rencontres ! C’est aussi ça un tour du monde réussi !