Ce matin, Fred boîte. Sa jambe droite traîne. Il avance avec difficulté. Non, il n'est pas tombé du lit. Non, il ne s'est pas tordu la cheville. Un serpent ne l'a pas mordu non plus. Sa tongue a juste laché. Et pour ne pas marcher pied nu jusqu'au supermarché en face, il la serre comme il peut, mais elle s'en va à chaque fois. Bref, vous l'aurez compris, un détail important du voyage. Allez, 9h30, bye bye Coober Pedy, hello Stuart Highway. Sans nouvelle tongue, car pas de taille adaptée au supermarché. On verra plus tard. Il fait 20°, avec du vent. Il fait donc un peu frais. On reprendrait bien un peu de 40° pour être franc. Et en descendant vers le Sud, contrairement à l'hémisphère Nord, on ne devrait pas gagner en température. Arrêt prévu ce soir à Port Augusta. Fin du Centre Rouge et du désert. Désormais, ce sera bord de mer.
On va faire court, il ne se passe pas grand chose ce matin. La route, toujours la même, toujours le même décor. Cela dit, pour une fois, de chaque côté, depuis hier en fait, une clôture un peu minable borde la route, pour empêcher les animaux de traverser. A la base pour la protéger des dingos. Le Lonely Planet précise que cette "dog fence" est la plus longue construction au monde, s'étendant sur 5300 km (on a dû en louper une partie), et donc plus grande que la muraille de Chine.
10h50, nous croisons un chameau mort sur le bord gauche de la route. Souvent, des pneux éclatés aussi. Pourvu que cela ne nous arrive pas. Ah oui, un panneau indique aussi que ce tronçon
sert de piste d'atterrissage en cas d'urgence (Emergency Landing Road). Nous sommes sur ce trait droit sans rien autour que nous avions vu en avion de là haut en arrivant de Perth.
11h45, nous voyons au loin un point noir au milieu de la route. Il grossit. En fait plusieurs. Nous ralentissons. 3 ou 4 aigles (des wedge-tailed eagles) prennent leur déjeuner, un kangourou. Nous passons à côté, et ils s'envolent juste à ce moment, nous laissant le temps d'arriver quasiment à leur niveau. Ils déploient leurs ailes, tous en même temps, et font chacun deux mètres d'envergure. Magnifique.
12h, pause sucrée à Glendambo, après 254km parcourus. 30 habitants. On se demande où ils sont. Pendant l'heure qui suit, succession de road trains, d'animaux morts. Du classique en fait. Une portion de route est en train d'être re-goudronnée. Même si nous passons doucement, cela va en fait laisser des traces sur le bas de caisse, de chaque côté, que nous découvrirons demain.
12h50, passage près du Lake Hart, sur notre gauche. Surprise, car d'une part, le décor change pour une fois, et d'autre part, car nous ne nous attendons absolument pas à voir une étendue
d'eau ici. Couleur blanche, rosée. En fait, il n'y a plus d'eau, mais juste le sel s'étant aggrégé. D'ailleurs, un tout petit peu plus loin, quelqu'un est allongé dessus pour prendre
une photo.
13h, arrêt à Woomera. 300 habitants. Mais une ville qui compte, à 375km de Coober Pedy. C'est en effet la ville qui abritait les complexes scientifiques et les chercheurs pendant la guerre
froide. Car ici, on teste des missiles et des roquettes. Après la découverte du V2 allemand, les anglais ont voulu développer leur propre missile de croisière, et ont choisi cette zone
pour procéder aux recherches et essais. Du coup, la ville est née pour cela, et est devenue un lieu majeur dans ce domaine, où bien des nations sont venues faire leurs propres essais (dont
l'Europe dans les années 70). Aujourd'hui, c'est le Japon qui s'en sert pour développer un avion supersonique. Pour vous donner une idée, la zone réservée fait 270 000km². En gros, la
moitié de la France métropolitaine. Un petit bout de terrain pour l'administration australienne. Nous ne croisons que 2 militaires, et 2 personnes au Centre d'Information de la ville. Le
reste est désert. On dirait une ville abandonnée. Nous déjeunons, visitons le musée (pas mal d'ailleurs), puis faisons le tour du Missile Park à côté (une zone délimitée où sont exposés
différents missiles et fusées), pas loin de là où nous sommes garés. Au Visitor's Center, Fred s'aperçoit que nous ne sommes pas loin d'Olympic Dam, une des plus grande mine au monde, qu'il
connait de nom par son boulot. C'est simple, c'est la quatrième plus grande mine d'or et de cuivre au monde, et la plus grande d'uranium. Des minéraux trouvés nulle autre part ont été
découverts ici. 1700 personnes travaillent ici, de 36 nationalités. C'est 400 km de tunnels souterrains, progressant de 65m par jour. Pour la petite histoire, la mine a été ouverte en 1956,
l'année des Jeux Olympiques de Melbourne. Elle s'est considérablement agrandie ces 20 dernières années, avec le développement des pays émergents.
14h30, nous repartons, et décidons de faire le détour de 70km, même si cela va nous faire "perdre" 2h30, pour aller voir à quoi ressemble cette mine, en imaginant qu'il va être
difficile de la visiter, ou d'entrer ("Hello, do you mind if we have a look at your facilities ?"). Ce genre d'endroits est toujours sensible, et étroitement surveillé. Au Visitor's Center,
la personne nous a dit que des tours étaient organisés, sans connaître les horaires. Allez, on se met en route. Toujours personne sur la route, ou si peu. Un peu vallonée, parfois
sinueuse, petite clôture de chaque côté, visibilité parfaite, sans rien que du plat à des kilomètres à la ronde, l'envie est grande d'appuyer sur l'accélérateur et d'exploiter le
mode "sport" de la voiture. Seule la peur de voir débouler un animal nous fait garder notre sagesse. Nous passons à côté d'une lignée interminable de poteaux électriques géants,
alimentant probablement la mine (même si celle si doit avoir sa propre centrale), filants vers l'infini de l'horizon. Nous arrivons à Roxby Downs, ville construite en 1988 spécialement pour
la mine. Assez agréable d'ailleurs, verte, avec piscine municipale, parfaitement goudronnée et propre, golf... tout est fait pour ne pas donner l'impression d'être au milieu du désert,
et créer un cadre de vie idéal pour les familles. Il faut savoir que les métiers liés aux matières premières sont très recherchés, surtout en Australie, dont une grosse partie du PIB dépend
de ce secteur. Il faut donc être capable d'attirer et de retenir les savoir-faire, les ingénieurs et techniciens, et leur famille pour rester compétitif dans ce domaine stratégique, et
l'un des plus rentables au monde, au coeur des enjeux internationnaux.
15h30, après avoir un peu cherché, nous arrivons devant l'entrée de la mine. Un poste de contrôle, et pas de la taille d'un simple péage, nous empêche de passer. On s'en doutait.
Malheureusement, la visite organisée a lieu une fois par semaine (aujourd'hui, le matin), s'il y a suffisament de personnes. On oublie, donc. Nous rencontrons un marocain travaillant
ici, passant en 4x4 le poste de contrôle, et surpris de voir des touristes. Il est content d'échanger quelques phrases en français avec nous. Nous restons 15 minutes à parler ensemble.
16h, passage à la pompe à essence, et reprise de la route, toujours aussi attirante sur la partie retour.
16h40, nous retrouvons la route principale, là où nous l'avons laissé tout-à-l'heure.
17h30, passage de road train, d'un convoi avec girophare annoncé un kilomètre avant pour cause de "oversized road train" qui nous oblige à rouler sur le bas côté, au ralenti. Le camion transporte une pelleteuse géante, probablement destinée à la mine.
A partir de ce moment, le décor commence à changer. Nous arrivons dans les Flinders' Range, une chaîne de montagne, semblable aux Mc Donnell. La végétation refait progressivement son
apparition, à petits pas. La terre est moins aride. D'abord des arbustes de 3 ou 4m de haut, éparses, puis un peu plus nombreux.
17h50, un train, interminable de longueur, passe au milieu du désert. Pas de passagers, juste du fret. Nous suivons également depuis une dizaine de minutes un pipeline, qui nous accompagnera jusqu'à Port Augusta.
18h, nous prenons conscience que nous allons voir la mer, et cela nous fait bizarre. Après une semaine de terre rouge et de "rien", on ne s'attend pas du tout à voir de l'eau et du bleu. Passage soudain dans un autre décor, sans véritable transition. Rouler des heures fait en plus perdre un peu la notion du temps.
18h30, arrivée à Port Augusta. Surprise, la ville est plus petite que ce que nous pensions, et moins charmante qu'imaginée. Nous nous attendions à une petite ville de charme de bord de mer, et nous arrivons dans un endroit sans saveur, où juste un canal menant à la mer le traverse. Nous avions imaginé nous faire un petit restau sur le port, style Cancale en Bretagne ou Antibes dans le Sud, mais las, nada, pas de port, et encore moins de petits restaurants comme nous les aimons en France. Au cours des deux prochaines semaines, nous allons progressivement nous apercevoir que de n'être "que" 20 millions d'habitants, ça donne des villes de province pas très peuplées, où l'offre des restaurants est faible, pour ne pas dire plus. A part un Mac Do, un Hungry Jack (le concurrent local) et un ou deux vrais restaurants sans interêt, il n'y a presque rien. Nous cherchons du coup un endroit pour dormir, mais tout est hors de prix (au moins 100 AUD, ça change !), et le choix est restreint. Nous allons donc au camping, et allons dormir ce soir, de nouveau, dans la voiture, pour 37 AUD (30 euros, le prix de l'emplacement unpowered, avec accès à la cuisine, aux douches et toilettes). La cabine coutait sinon 90 AUD. Pour une fois, nous avons du Wifi. Nous pouvons donc mettre le site un peu à jour (mais peu), mais impossible de télécharger photos et vidéos, car la connexion est quand même limitée. Nous allons faire quelques courses au supermarché, pour préparer ensuite une grande salade dans la cuisine animée par d'autres backpackers (il nous reste quelques aliments du 4x4).
1h du matin, nous nous endormons après avoir regardé une série sur l'ordinateur dans la voiture, et avoir travaillé un peu sur le site.
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Phil (jeudi, 28 mars 2013 17:54)
J'ai tout lu! Vous pouvez mettre la suite;-)))) m'a fille Ninon adore avoir de vos news et découvrir les photos...
Et comme il n'y avait pas de com je me suis permis..... Bonne route à tous les deux!